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mardi 12 août 2008

Amar Bouzeraïd, l’écailler 3 fois médaillé

Eloignons-nous des records olympiques pour chercher si l’exceptionnel ne se cacherait pas tout près de nous.

C’est évidemment Jacques, le Chef de cuisine de l'Excelsior, qui m’a présenté Amar Bouzeraïd, que toutes les célébrités locales et internationales en visite à Nancy connaissent bien. Il n'est pas rare de voir Michel Platini (dès qu’il est de retour dans sa ville natale) faire la queue le long du banc d’huîtres de l’Excelsior, comme beaucoup de joueurs de football. Il y a quelques jours Amar a servi Carlos Henrique Dias, l'attaquant brésilien, connu sous le surnom de Kim, dont le titre de gloire est d'être vainqueur de la Coupe de la Ligue en 2006 avec l'équipe de Nancy où il vient de passer trois années. Il sera prochainement transféré au Qatar mais il reste encore fidèle aux institutions nancéiennes.

Amar a remporté par trois fois les trois concours auquel il a mis en jeu le titre de meilleur écailler de France.

J’exprime ma surprise, imaginant qu’Amar n’a pas été écailler toute sa vie.
Je suis arrivé en France en 1975 : c’est inoubliable. J’étais comme un français qui découvre l’Amérique. Pour moi qui venais de la campagne ma première surprise était de compter autant de voitures que de magasins. J’ai d’abord été fleuriste pendant 8 ans puis je suis entré dans le groupe Flo. J’y ai appris le métier et maintenant je commence à recevoir moi-même des stagiaires. C’est devenu une vraie passion.

Il m’explique le déroulement des épreuves.
Il faut être le plus rapide à ouvrir une centaine d’huîtres mais il faut aussi qu’elles demeurent toutes impeccables. Le moindre éclat dans leur coquille se paie d’un point de pénalité. Il faut combiner vitesse et présentation des produits.

C’est comme une course d’obstacles : le cavalier doit franchir les barres le plus vite possible sans en faire tomber aucune ?
On peut dire cela. J’ai ouvert en 5 minutes les 100 huîtres imparties. Le palmarès s’est joué à 2-3 ou 4 huîtres près.

Que deviennent-elles après ?
Dans certains concours les participants jettent les coquilles par terre au fur et à mesure (elles sont souvent abîmées d’ailleurs) mais là elles doivent être joliment appétissantes parce qu’elles seront consommées par les spectateurs venus encourager les candidats.

Quelle est la seconde épreuve ?
On reçoit tous les mêmes fruits de mer que l’on doit présenter de la manière la plus originale possible sur un plateau. On a le droit d’apporter des éléments décoratifs. J’avais 2-3 poissons en bois verni, quelques étoiles de mer et des coraux qu’un copain m’avait ramené de voyage. C’est ce qui a fait le succès de ma présentation. Peut-être le costume aussi. Je portais la tenue Flo : pantalon blanc, tee-shirt blanc, casquette. Enfin, il faut répondre correctement à 10 questions en déjouant les pièges.

Par exemple ?
une plate numéro 4 est-elle plus ou moins grosse qu’une creuse numéro 5 ?


Là je sèche. Vous pouvez en dire plus …
Les creuses sont classées du numéro 5 (la plus petite) au numéro 1 (la plus grosse). Les plates commencent au numéro 4 (la plus petite) jusqu’au 0, double zéro, etc … voire même quintuple zéro (dite pied de cheval) pour les plus énormes.

Pourquoi dit-on que les huîtres sont moins bonnes en été ?
C’est la saison de reproduction, durant ces fameux mois sans R que sont mai, Juin, Juillet et Août. La présence de la poche laiteuse, inesthétique est déroutante pour le néophyte. Je conseille alors plutôt les huîtres plates. Parce que les œufs sont autour de la coquille et peuvent se retirer facilement. Alors que dans les creuses la poche de lait est plus fragile. Elle risque d’être percée d’un coup de fourchette et de se déverser dans la coquille.

Quelles sont les meilleures ?
La Gillardeau, sans aucune hésitation. Elle vient directement de Bourcefranc (17560), en face de l’île d’Oléron. Mais il n’y a pas de vente directe aux particuliers.

Combien de temps une huître peut-elle survivre hors de l’eau ?
Très longtemps. Certains poissonniers les gardent un mois et les vendent tant qu’elles sont encore vivantes. Ce n’est pas le cas à l’Excelsior. On ne prend aucun risque avec la fraîcheur. Jamais au-delà de 5 jours.

Y-a-t-il des clients qui ont des exigences particulières, surprenantes ?
Je me souviens d’un client qui a exigé, une nuit d’été 70 claires numéro 1. Il devait aimer les huîtres abondamment laiteuses. Un autre a commandé un plateau avec 36 clams … alors que très franchement il faut déjà un bon estomac pour en manger 2 d’affilée.

Je trouve pour ma part que les bulots ont le goût d’escargots caoutchouteux. En mettez-vous sur les plateaux ?
Tout à fait. Il faut croire que les gens les aiment puisqu’on en ébouillante 10 kilos chaque jour.

Avez-vous de grosses réserves ?
En été on se limite à 120 claires numéro 1, et 300 numéros 2. Mais en hiver le stock monte à 600 huîtres.

Cela doit peser lourd …
Entre Noël et le jour de l’An ce sont 16 Tonnes de fruits de mer qui transitent sur le banc d’huîtres installé à l’entrée du Flo.

Pas étonnant que certains soir de décembre la queue se prolonge loin dans la rue Poincaré … parce qu’un tel volume, cela doit prendre plusieurs fois 5 minutes à écailler, même si on tient une forme olympique !

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