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La publication des articles est conçue selon une alternance entre le culinaire et la culture où prennent place des critiques de spectacles, de films, de concerts, de livres et d’expositions … pour y défendre les valeurs liées au patrimoine et la création, sous toutes ses formes.

jeudi 31 mai 2012

Bons baisers de Manault au Théâtre La Bruyère


Un pupitre, deux chaises, une toute petite scène, qui est celle où s'est fait l'immense succès des 39 marches, couronnées, comme je l'ai entendu, par une "flopée" de Molières.

Bons baisers de Manault n'est pas à proprement parler un spectacle. Le carton annonce une quinzaine de lectures. Le soir de la première Manault Deva et François Berléand se faisaient attendre. Eric Métayer est venu sur scène justifier le retard, à cause d'une "petite chose bien précise qui ne marche pas".

Tout le monde, à commencer par lui, était surpris qu'une "simple" lecture ne puisse pas commencer à l'heure. Les fans de Manault, et ils étaient nombreux dans la salle, ont l'habitude d'entendre la jeune femme à heure fixe, le dimanche vers 13H50 sur France Inter en direct du studio 109 dans l'émission "3D journal" de Stéphane Paoli.

Ses chroniques ont fait l'objet d'un livre, sous le même intitulé, et voilà maintenant qu'elle nous les livre en live sur scène. Pour moi qui ne la connaissais pas je me suis régalée de son style, du soin qu'elle apporte à l'écriture, de son humour acéré et de sa manière d'occuper la scène. Aucun doute qu'elle est autant femme de radio que comédienne.
J'ignore ce qu'Eric Métayer, vite installé en corbeille, avec carnet de notes et stylo pour ne pas perdre une idée (et il en a énormément) aura pensé de la représentation. Certes il y eut des petites hésitations, des répliques improvisées, des clins d'oeil à la salle, mais c'était vif et drôlissime. Les rires fusèrent souvent, et de bon coeur.

Les "chutes" de chaque scénette étaient attendues comme une éclaircie après l'orage entre l'homme-type, alias François Berléand, et la femme-standard, alias Manault Deva. On devinait leur complicité pour jouer ces rôles qui ne leur ressemblent pas dans la vraie vie :
- Ah, vous êtes doux, gentil ... donc ringard !
- Vous êtes chiante, vous faites peur aux hommes !
Conseil de Manault : Soyez plus conne, ils adorent çà !
Chaque sexe en prend pour son grade. Le féminin est parfois assimilé à la pute à papa, autrement dit de la bidoche en talons aiguilles pour un prédateur. Le masculin, s'il est amateur de superficielles est "forcément" conducteur de 4x4. Quand le second prend de l'âge il vieillit, quand c'est de la première qu'il s'agit elle mûrit.

Le couple rompt par SMS, c'est peu élégant mais l'exemple est venu de très haut. N'est-ce pas le moyen employé par une certaine C... lorsqu'elle a quitté le "petit" Nicolas ? (c'est pas Manault qui l'a écrit NDLR).

Les enfants s'incrustent dans les foyers comme une plaie. Ne pas en avoir serait un bon moyen de faire des économies et d'éviter les soucis.

Le public compte les points, tranquillement à l'abri dans son fauteuil, quand soudain il risque de se sentir interpellé en entendant que l'utilisateur du portable dans les transports en commun est un exhibitionniste inconscient

Le fait qu'ils aient tous les deux leur texte à la main n'est pas un inconvénient. Cela installe une distance qui évite qu'on imagine un duo infernal. Nous sommes face à deux amis qui philosophent. Et même si parfois, ils sont à ras des bleuets on apprécie de ne pas se prendre le chou pour les comprendre au premier degré.

On reçoit ces baisers là comme on appréciait autrefois les cartes postales vantant des vacances de rêve alors qu'on savait pertinemment que les protagonistes s'étaient morfondus sous la pluie. Personne n'est dupe, mais quel bonheur. Les baisers de Manault sonnent comme des claques et on tend l'autre joue ... en espérant une reprise à la rentrée.
Bons baisers de Manault jusqu'au 21 juin 2011, du mardi au vendredi à 18h 30
Théâtre La Bruyère, 5, rue La Bruyère, 75009 PARIS
Location : 01 48 74 76 99

mercredi 30 mai 2012

MAGNUM, une marque éternelle qui joue l'éphémère


Un de nos ancêtres s'est vendu pour un plat de lentilles (il avait sans doute très très faim). Je pourrais (peut-être) le faire pour des glaces ... alors quand Magnum a agité un bâtonnet, me promettant de créer ma propre recette j'ai juré que je viendrai voir l'événement de près.

La marque a en effet décidé d'ouvrir un café éphémère dont vous pourrez, vous aussi, profiter ... jusqu'au 24 juin ... ce qui veut dire qu'il ne faudra pas attendre que le soleil se décide à se pointer cette année. Quand on sait que ce sont les Finlandais qui sont les plus gros consommateurs européens de glaces on ne devrait pas se soucier de la météo. Ce sont d'ailleurs les norvégiens qui ont inventé l'Omelette en version glacée.

Le cadre est élégant : un bar, plusieurs lieux où se poser pour savourer, un sous-sol qui a des allures de boite de nuit ... Le choix est vaste mais si les combinaisons sont multiples on reste tout de même dans le "classique" que l'on connait en matière de Magnum, en résumé c'est vanille ou chocolat.
Une fois que vous aurez annoncé la base vous déterminerez le parfum de votre enrobage (chocolat blanc, chocolat au lait, chocolat noir).
Jusque là rien de très difficile. Je pensais que chacun tremperait son bâton dans le bain mais faut croire que la marque doutait de la dextérité de la clientèle, sans compter qu'il y a sans doute des critères d'hygiène à respecter. Bref, on "cuisine" pour vous.
La véritable personnalisation peut ensuite commencer. On vous proposera d'élire trois ingrédients qui seront prisonniers de l'enrobage et qui garantiront  à votre "création" de correspondre à ce qui vous fait plaisir ... à cet instant. Car vous n'aurez qu'une envie ... recommencer avec d'autres combinaisons.
On est plus ou moins dans le mou ou le croquant. Le service en demi-boite permet de ne perdre aucune miette de la portion et même, de continuer à épicer la glace avec les ingrédients supplémentaires.
L'invitation précisait qu'il fallait donner un nom à sa création. Sauf que ce soir-là personne ne notait rien et ce qui fut dégusté resta définitivement éphémère. Ne restent qu'une série de photos des vedettes, glaces et dégusteurs au demeurant qui pour l'éternité resteront dans les albums Facebook.
On n'attend pas que cela fonde pour déguster. La gourmandise ne peut attendre.
Un petit tour au sous-sol le temps de digérer ... de bavarder avec des filles, bloggeuses, et avec des garçons célèbres ou pas (encore) ...
Quelques "vedettes" de la saison dernière de Secret Story. Le mot Temptation clignote autant que nos badges VIP. Après le blanc, passons au noir et c'est reparti pour une nouvelle combinaison.
Magnum porte bien son nom. C'est le grand frère de Miko, fort, et magn... ifique. Une expérience sympathique, tout à fait dans la tendance "Subway" qui propose au client de choisir les ingrédients de son sandwhich. On aimerait voir resurgir cet éphémère dans quelques semaines sur le sable de Paris Plage !

Magnum Paris, 23, rue du Roi de Sicile 75004 Paris
Métro : ligne 1, Station : Saint Paul
Mardi, Mercredi et Dimanche de 12h à 20h. Jeudi, Vendredi, Samedi de 12h à 22h.

dimanche 27 mai 2012

Musique & Littérature dans le parc de la Vallée aux loups

La 30ème édition du Festival du Val d'Aulnay a offert un spectacle alliant musique et littérature dans le magnifique cadre de la Vallée aux Loups où les lecteurs du blog vont finir par penser que je dispose d'une entrée particulière tant il est vrai que j'y suis venue ces derniers temps, de jour ou de soirée, comme de nuit.

La voix de ténor de Mickaël Bennett a été très appréciée. Il a commencé le concert en chantant Ich liebe dich de Beethoven, qui pouvait évoquer une des passions de l'ancien maître des lieux, Chateaubriand, dont la présence est gravée dans la mémoire collective.

Il était accompagné par la harpiste Sandrine Chatron dont le doigté est réellement enchanteur. Elle a aussi interprété une très délicate Fantaisie de Louis Spohr.
Ce sont cependant les textes qui ont été lus par Cécile Combes que j'ai davantage retenus. Sans doute en premier lieu parce qu'ils sont en langue française (tous les airs étaient en allemand). Egalement parce que le choix effectué par la comédienne témoignait des deuils symboliques qui avaient poussé l'écrivain à rechercher une inscription dans une "terre stable", concrète cette fois... terre qu'il a pourtant quitté relativement vite, sans parler du départ définitif qui est le lot commun.

samedi 26 mai 2012

Folles noces avec Catherine Delourtet et Jean-Paul Delvor

(mise à jour le 15 mars 2013)
Considérez vous comme invité à ce mariage qui est conçu comme une vraie revue. Vous aurez droit d'abord à la partie "classique" de la cérémonie avec l'arrivée des mariés à l'église et en fanfare. Catherine (Delourtet) s'offusque de trainer des casseroles. L'eau commence illico à bouillonner dans le gaz entre les tourtereaux. Jean-Paul (Delvor) est sommé de ne plus faire aucune allusion désobligeante à l'égard de sa belle-famille. La jeune femme n'a plus de voix, plus de traine, se sent "toute nue" mais sourit encore parce qu'on la regarde.

Ils nous prennent à témoins de leurs épousailles, unis qu'ils sont par l'amour et surtout par les planches. La situation est prétexte à enchainer les tubes, que l'on fredonne bouche fermée comme l'Avventura de Stone et Charden. C'est aussi l'occasion de découvrir des chansons moins connues comme Kaoutchouski de Georgius, l'histoire d'un cosaque "grand comme ça" qui aimait la belle Petrouchka. On croirait les paroles récrites sous forme parodique mais non ... preuve s'il en faut encore que la réalité dépasse la fiction.

Ils se disputent à propos du menu. C'est classique. Ils évoluent au ralenti comme s'ils étaient filmé par la caméra de Claude Lelouch, exécutent un medley et des pas de danses insensés. Le public souffle les répliques. Elle demande à son chéri s'il aime son ventre, son dos, ses fesses, évoquant la BB du Mépris de Godard avant de se lancer dans une réinterprétation assez ébouriffante de Toi toi mon toit d'Elli Medeiros.
Dans une seconde partie ils font surgir des couples célèbres avec humour et intelligence, réaménageant parfois l'histoire et jouant délicieusement avec les accents. Mona Lisa et Vinci sont égratignés, mais si peu ... Ils se donnent pleinement et la salle est véritablement épatée par leur performance. Catherine et Jean-Paul prétendent qu'ils s'amusent tellement sur scène qu'il ne sentent pas la fatigue. L'interactivité avec le public nous porte, disent-ils avec fair play. Il faut d'ailleurs voir les demandes d'autographe à la sortie !

Ils aimeraient poursuivre dans une autre salle parisienne. Et ce ne serait que justice. Ils conjuguent les talents de comédiens, de chanteurs, et de danseurs. Ce sont des interprètes qui ont le goût du texte. Aucune chanson n'est là pour faire joli, mais parce qu'elle a du sens, quitte à ce que celui-ci soit de l'ordre de la ponctuation. Il faut à cet égard souligner l'accompagnement aux claviers et à la guitare par Thomas Ribes.
C'est la première création de ce couple qui se connait depuis une vingtaine d'années. Ils ont beaucoup joué ensemble, des classiques, du boulevard ... et c'était plus fort qu'eux, il fallait qu'ils fassent des sketchs et poussent la chansonnette en seconde partie de soirée pour les copains et les techniciens se trouvant là. Il était temps qu'ils se lancent en duo et on souhaite longue et heureuse vie à cette aventure qui a commencé fin 2009. Leur numéro est parfaitement rodé mais les artistes tiennent à conserver une petite part d'improvisation, histoire de pimenter chaque soirée. On devine qu'une suite est déjà en préparation. Ce sera un joyeux événement, à n'en pas douter.

Profitez du mauvais temps qui s'annonce pour courir voir ces Noces. Vous en ressortirez aussi ragaillardi qu'il y a quelques mois après Padam Padam ou encore Une étoile et moi, deux spectacles d'Isabelle Georges avec lesquels je trouve une sorte de cousinage.

Jusqu'au 7 juillet 2012 au Théâtre 14 Jean-Marie Serreau, 20 avenue Marc Sangnier, 75014 Paris, mardi, vendredi et samedi à 20 H 30, mercredi et jeudi à 19 h, matinée supplémentaire à 16 heures le samedi, 01 45 45 49 77 ou contact@theatre14.fr

Prolongations pour 50 "cérémonies" exceptionnelles dont vous pourrez être les témoins du 18 juillet au 29 septembre 2012 à 19h à l'ALHAMBRA , 21 rue Yves Toudic, 75010 Paris
Renseignements et réservations  01.40.20.40.25
Tous les détails ici : http://www.follesnoces.com/alhambra.html

La pièce est depuis en tournée à travers la France. Pour plus d'informations, cliquez sur ce lien :
http://www.follesnoces.com/villeneuvesurlot.html

En bonus pour les spectateurs qui voudraient connaitre les paroles d'une chanson incroyablement difficile à mémoriser, voici le Cresoxipropanediol en capsule chanté par Ginette Garcin en 1966, et dont on doit les paroles à Jean Yanne :

Souvent lorsque ça va mal
Quand je n'ai pas le moral
Quand je sens mes nerfs qui craquent
Ou lorsque je suis patraque
Pour me mettre dans le bain
Je connais un bon moyen
Dans un verre d'eau sucrée
Je prends pour me remonter
[refrain :]
Du trisilicate anhydrique de magnésium
Du quadrisulfogaiacolate de potassium
Du glycérohydrato monoamoniacal
Du bichlorhydrate milenicophysidal
De l'orthodioxybenzenotocophérol
Du cresoxipropanediol, en ampoule
De l'aminophénisulfonacophétamide
De l'hexachlorocyclohexanysculoside
De l'acitalmine isopropyl orbiturique
De l'etabenzyl amoniocodiphosphorique
De l'acetylameniphenylarcinazole
Du cresoxipropanediol, en capsule

Rien ne vaut je le proclame
Les vieux remèdes de bonne femme
Mon grand-père d'un geste fier
En sortait de sa tabatière
Papa qui était estafette
En avait dans sa musette
Et quand j'ai passé mon bac
Je trimbalais dans mon sac

[refrain]

Et si vraiment ça ne va pas mieux, pas mieux, pas mieux
Je prends deux ou trois aspiri-hi-hi-iiiiiines
Et un sucre

vendredi 25 mai 2012

Pâtes, pointes et queues d'asperges

La saison des asperges bat son plein. Alors en avant pour deux déclinaisons avec des pâtes. On peut prendre celles qu'on aime, ou dont on dispose dans son placard. mais il faut savoir que les torsadées prennent mieux la sauce.

Version chaude
On prépare une sauce dans une poêle avec une échalote revenue dans du beurre. On ajoute les pointes d'asperges cuites vapeur (ce qui les garde croquantes) pour les dorer un peu. On lie la préparation avec une très grosse cuillère de crème fraîche AOC d'Isigny, une petite de moutarde de Reims, du sel et du poivre des cimes.

Version froide

Traditionnellement ce légume est servie avec une mayonnaise, ou une sauce mousseline, parfois une vinaigrette. Mais on pourrait faire plus original avec une association "moutarde ketchup-crème fraiche".

La moutarde ketchup est une des spécialités de la maison Martin Pouret. Leur produit phare demeure le vinaigre, en l'occurrence le vinaigre d'Orléans à l'ancienne. Cette fois j'ai employé leur vinaigrette asiatique, du persil plat haché (aux ciseaux) et du galanga râpé. J'ai ajouté des olives noires, des copeaux de bleu d'Auvergne, une tomate coupée en dés et finalement les queues des asperges tranchées en tronçons de 3 cm, 


Autres emploi du galanga ici.

jeudi 24 mai 2012

Art'by Cabernet d'Anjou

C'est la quatrième édition pour les parisiens, la première pour moi. La chaleur est presque insoutenable ce soir de premier vrai soleil et si on sait qu'il faut consommer avec modération c'est tout de même très festif de prendre l'apéro avec ce breuvage qui nous est proposé très frais en dégustation.

Des grappes de ballons noirs et roses assez clinquantes signalaient les cafés participant à l'opération deux heures durant, et pas au-delà. On sentait d'ailleurs dans certains troquets que cet afflux de population dérangeait et cela fait une drôle d'impression d'être persona non grata alors qu'on est invité(e) dans le même temps.

Les heureux dégustateurs ont malgré tout arpenté avec enthousiasme le quartier de Saint-Germain-des-Prés, à pied ou, pour les plus chanceux en vélo-taxi, pour aller à la rencontre d'un vin, un producteur, un artiste, et ce à 10 reprises.

Après avoir foulé le tapis rose, gouté le breuvage, et répondu à une question particulière chaque participant collait un sticker sur un carnet de bord qui, une fois rempli lui donnait la possibilité de recevoir l'Art'Book by cabernet-d'anjou. Je n'ai pas bien compris pourquoi la règle a vite été modifiée et que les passeports remplis s'échangeaient alors contre une bouteille de rosé gracieusement offerte à la dixième étape.

L'inconvénient, entre autres, fut d'inciter les "découvreurs" à circuler au pas de course et à zapper les discussions avec les producteurs et les artistes de l'association Barde la Lézarde, pressés qu'ils étaient d'arriver au terme.
La présidente de cette association, May Livory, invitait le public à puiser dans un éventaire une papillote surprise qui le transporterait dans un univers surréaliste.
L'illustrateur Beb-Deum croquait sur des nappes en papier des portraits dédicacés.
Auprès de Monsieur Lui, soudainement un lien se créé et devient langage commun. Le dessin est une écriture infinie. Cet ancien illustrateur publicitaire distribuait des copies de ses dessins, retouchées et signées à l'instant, faisant d'elles des pièces uniques, en règle générale très appréciés ... mais on ne peut pas plaire à tout le monde puisqu'on n'est pas louis d'or, n'est-ce pas ?

Par contre tous les producteurs ont été médaillés au dernier Salon de l'agriculture et vous remarquerez que la bouteille du rosé d'Anjou est particulière, élancée et siglée.
Hélène Sauvage mettait le promeneur à contribution, lui faisant écrire une ligne d'une correspondance amoureuse imaginaire entre Juliette Gréco et Miles Davis sur des bandes de scotchs roses qui reliaient les deux portraits. Un instant pour apprécier un verre du Domaine de Sauveroy et me voici en route pour une prochaine étape.
Etienne Lécroart imagina une suite de cases de bande dessinée pour composer un scrabble sur la vitre d'un troquet en faisant intervenir le passant pour rédiger les textes des bulles, en exerçant son droit de veto quand l'aphorisme ne lui convenait pas. Mon joyeux "pourvu qu'on ait le bal" imaginé dans ce café qui se nomme le Balto passa ainsi à la trappe.
Raphaëlle Boutié intervenait sur les sous-bocks décorés un peu à la manière de Pollock pour leur donner la touche finale. Et comme elle le dit avec humour : il faut en boire du pinard le temps que la peinture sèche si on veut repartir avec sa petite oeuvre.
Je fus incapable d'achever le périple dans les temps et je ne relaterai donc pas les performances de tous. Ils eurent en commun de solliciter le public à mettre la main et à se prêter au jeu en donnant un peu d'eux-mêmes. La couleur rose inondait les productions en peinture, encre, bande ou rectangle de papier brillant. On la remarquait aussi sur les tabliers des sommeliers, sur les longs crayons à papier et sur les tenues des artistes.

L'ambiance était festive comme il se doit pour un anniversaire de mariage entre l'art contemporain et le premier rosé demi-sec de France dans un quartier mythique. J'ai laissé tomber mes a priori sur ce breuvage dont je n'avais pas le souvenir qu'il pouvait être à la fois si doux et acidulé, si parfumé et fruité, quelquefois velouté, ou exhalant des arômes de bonbons et de barbapapa, à moins qu'il ne soit très subtilement boisé, mais toujours avec davantage de rondeur que de "sucrosité" et l'impression de croquer directement dans le raisin. J'avais jusque là tendance à mettre tous les rosés ... dans la même bouteille, sans distinction de saveur particulière. Je l'imagine désormais aisément au-delà du début de repas, capable d'accompagner un foie gras aussi bien qu'un Gewurtztraminer. Et bien entendu tous les plats exotiques et les salades de fruits.
Dommage tout de même de n'avoir pas eu vraiment le temps d'échanger avec les vignerons. Je reste sur ma soif en ce qui concerne les procédés de saignée, de pressage direct ou pas, de macération pelliculaire, de fermentation à basse température et de chasse à l'oxygène. Et si j'ai apprécié les vraies différences organoleptiques des uns et des autres je serais bien incapable de les associer à des producteurs chez un caviste. Je suis donc candidate à un stage in situ ...

Je me permettrais aussi deux recommandations pour ceux qui participeront à la prochaine édition de cet apéro artistique. Qu'ils se chaussent de rollers pour rallier sans peine les cafés excentrés, et qu'ils glissent sous leur bras une baguette de pain (parce que très franchement c'est mission impossible et cruelle de déguster en restant à jeun). Le béret ou mieux le canotier pourrait être fourni par l'organisation et servir de base aux interventions des artistes. Car rien n'est mieux qu'un objet qu'on emportera pour le reporter tout l'été. Le souvenir renforce la présence à l'esprit.
J'ai une dernière suggestion pour aider l'amateur à savourer un verre très frais. Quelques minutes suffisent pour congeler des glaçons dans des formes élégantes en recyclant les emballages légers (et indestructibles) qui séparent les chocolats dans les ballotins. C'est tout de même mieux que des glaçons d'eau quand on n'a pas le temps d'attendre que la bouteille se refroidisse dans son intégralité ou qu'on ne dispose pas d'un seau à glace adéquat.
Les bars participants à l’édition du jeudi 24 mai de Art’By Cabernet d’Anjou 2012 entre les rues de Buci et Mazarine étaient:
Le Balto, Le Bar III, Le Buci, Le Café Le Conti, L’Echelle de Jacob, Les Etages, Le Hideout, The Mazet, Le Molière, Le Night Owl.
Plus de renseignements sur la manifestation en se rendant sur vinsdeloire.fr/
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mercredi 23 mai 2012

L'an prochain au Centre d'art et de culture de Meudon


La présentation dite de saison a eu lieu ce soir avant un concert de flamenco qui fut fortement et passionnément applaudi.

La "saison" est une période qui se calque sur l'année scolaire. Certains directeurs passent en revue chaque spectacle, faisant monter sur scène l'auteur, un acteur ou un autre membre de l'équipe artistique. Chacun essaie de "vendre" son travail en mettant bout à bout un maximum d'arguments. Le public est attentif, puis perd le fil, se lasse, souffre de la chaleur et se promet que l'année suivante on ne l'y reprendra plus.

Françoise Pointard, nouvelle directrice du Centre d'art et de culture de Meudon, a du en faire la cruelle expérience puisqu'elle a radicalement opté pour une autre méthode. Elle a commenté en moins de 40 minutes toute la brochure 2012/2013 en établissant des liens qui témoignent d'une forte cohérence saluée par le maire-adjoint Denis Larghero.

Elle a programmé plusieurs spectacles qui ont été de grands succès cette année. C'est toujours une énorme chance que de pouvoir assister (et à un tarif avantageux comparativement aux prix des salles parisiennes) à des pièces dont on sait à l'avance qu'elles ne décevront pas. C'est le cas des 39 Marches d'Eric Métayer, Molière 2010 de la pièce comique, dont je parlerai bientôt en détail sur le blog. C'est aussi le Mec de la tombe d'à coté qui a été tant de fois repris dans les théâtres parisiens depuis cette même année 2010 et qui demeure toujours un grand succès de librairie.

C'est une autre reprise qui ouvrira en quelque sorte le bal le 21 septembre sous la houlette de la grande Catherine Hiégel. L'adjectif n'est pas abusif : elle a reçu le Molière de la meilleure comédienne en avril 2011 en estimant avec humilité que de toutes les reconnaissances c'était toujours celle du public qui lui importait le plus. Renvoyée de la Comédie française (c'est le mot qu'elle a elle-même employé) peu de temps auparavant elle a pris depuis plusieurs magnifiques revanches. Son Bourgeois Gentilhomme tonique et ébouriffant fera sa rentrée parisienne à Meudon, après un séjour en résidence, constituant ainsi un double cadeau adressé aux meudonnais qui devraient apprécier de revenir dans la salle pour une comédie-ballet.

Dans un registre proche, la Botte secrète donnera l'occasion de traverser l'âge d'or de l'opéra bouffe avec le rire avant de revenir un mois plus tard pour rire avec les 39 marches.

J'ai aussi noté un Retour à Ithaque, mis en scène par René Loyon, dont j'ai beaucoup apprécié Don Juan le mois dernier. On retrouvera aussi de grands acteurs dans le très beau roman de Russell Banks, De beaux lendemains.

Coté danse on ne pourra pas passer à coté de la nouvelle chorégraphie imaginée par Luc Petton. Après le théâtre national de Chaillot et l'immense succès de sa Confidence des oiseaux, il présente Swan, avec 6 danseuses et 10 cygnes évoluant dans une intimité inouïe initiée depuis leur sortie de l'oeuf.

Le hip hop est un des axes récurrents à Meudon. Quel souvenir que Nos limites en janvier 2011 ! Ce sera la Compagnie Käfig de Créteil qui explorera l'arène et les clichés de la boxe en connivence avec la musique de Schubert, de Ravel ou de Philip Glass jouée par le Quatuor Debussy.

Les amateurs de baroque se réjouiront de la venue de Sur les rives d'Abyssinie et de la Conférence spectacle autour de Louis XIV menée par Béatrice Massin, ultra spécialiste dans le domaine de la danse baroque. Les chants de l'Age d'or espagnol, interprétés par Françoise Atlan ne devraient pas moins les satisfaire.

Coté musique, nous avons entendu ce soir la trompette d'Ibrahim Maalouf et je recommande les concerts de David Grimal, que j'ai eu la chance d'entendre en octobre 2009. Le choix de Dominique A, dont l'album Vers les lueurs est déjà un formidable succès puis du concert très théâtralisé de Vincent Delerm se doit également d'être salué.

Le jeune public n'est pas oublié. Henriette & Matisse sera un spectacle familial pour comprendre la relation entre la danse et la peinture. La veille, le samedi 20 octobre, à 17 heures, chacun pourra croquer les deux protagonistes qui prendront la pose en devenant vos modèles, le temps d'une petite forme de trente minutes au musée d'art et d'histoire.

Je ne vous ai pas tout dit ... la brochure du centre d'art vous donnera un complet panorama qui vous convaincra de l'intérêt du voyage dans le temps et dans l'espace pour imaginer un univers plus riche que celui que nous impose la réalité quotidienne. L'ouverture des abonnements aura lieu le 29 mai à 15 heures pour composer votre parcours avant l'été. A savoir : un système de covoiturage facilitera dorénavant les déplacements.
Il faut bien entendu souligner aussi la qualité du concert qui a suivi. Paco El Lobo s'est produit en trio et nous a donné un aperçu de sa maitrise de nombreux styles de flamenco. Il est reconnu pour être l'héritier de la grande tradition flamenca. Capable d’interpréter avec une parfaite maîtrise taranta, rumba, tango, ralejo et bouleria ..., il est le seul musicien actuel – espagnol ou non – à proposer en concert un panorama stylistique aussi large. sa guitare et sa voix ont envouté le public. La danseuse a été rappelée elle aussi plusieurs fois. sa tenue en pantalon permettait de mieux apprécier le jeu de jambes et son travail proche de la tauromachie.

D'ici là il vous reste trois jours pour visiter l'exposition d'oeuvres de Gaston Watkin. Né à Toulouse, le sculpteur a vécu à Meudon. Il obtint le 1er Grand Prix de Rome pour son Saint Etienne lapidé. présent aussi bien dans la figuration comme dans l’abstraction, il a travaillé la pierre, le vitrail, le bronze, la tôle, le béton et les tiges d’acier.

Centre d’art et de culture, 15 bd des nations-Unies, 92190 Meudon
meudon.fr (rubrique culture), Accueil/billetterie 01 49 66 68 90

mardi 22 mai 2012

Kaléidoscope, un éditeur dont chaque livre est une surprise


C'est suffisamment rare pour qu'on le souligne. Si Kaléidoscope est diffusé par l'Ecole des loisirs (dont on pense à tort qu'elle est le titre d'une de leurs collections) c'est une maison indépendante sur le plan éditorial.

Elle a été créée en 1989 par Isabel Finkenstaedt, qui propose autant de créations que de co-éditions, surtout avec des anglo-saxons, en raison probablement de son origine américaine.

Elle a travaillé chez Flammarion et entretient de solides amitiés de longue date avec des auteurs comme David Mc Kee dont le fameux éléphant bariolé Elmer a fêté ses 40 ans il y a 4 ans, ou avec Anthony Browne, dont l'animal fétiche est un gorille.

Kaléidoscope a consacré un livre entier à cet auteur-illustrateur. Intitulé Déclinaisons du jeu des formes, cet ouvrage retrace l'oeuvre et le parcours de ce grand artiste qui obtint le prix Hans Christian Andersen en 2000. 

La maison a une politique de fond, réimprimant régulièrement des titres appartenant à son patrimoine comme des ouvrages de Tana Hoban, de Geoffroy de Pennart, de Martin Wadell, d'Ed Emberley ou Emil Gravett.  Elle ajoute régulièrement des rééditions de livres empruntés à d'autres éditeurs, comme celle de John Burningham avec Le panier de Stéphane dont la première édition date de 1980, chez Flammarion.

Kaléidoscope favorise aussi les nouveaux talents. Christine Naumann-Villemin appartient désormais aux classiques. Son premier livre, La tétine de Nina, est arrivé par courrier. L'espiègle Nina est désormais très présente dans le catalogue qui compte près de 350 titres, dont une trentaine de nouveaux chaque année.

Ni format récurrent, ni collection chez Kaléidoscope dont le principal critère de sélection est la capacité d'un ouvrage à transmettre des émotions aux enfants, pour les accompagner dans leurs apprentissages. Il est tout autant important que le livre touche aussi l'enfant de 5-6 ans qui est resté en chacun de nous. Chaque page doit être une surprise.

Cherche figurants de Michaël Escoffier est une invitation au second degré qui se termine en clin d'oeil avec une photo de l'auteur. C'est lui, et vraiment lui, qui a pris la pose. L'humour est une des composantes de la maison. Au cochon d'Emile de Stéphanie Henrich en est un exemple récent, situé dans une ambiance années 50. Le même auteur signe aussi Ah Varsovie et Chasse au gorille. Sauf si de Jim Averbreck est de nature à stimuler l'imagination des jeunes lecteurs, sous un angle plus conceptuel.

Certains livres se savourent comme des comptines. Par exemple Un gars, de Laura Vaccaro Seeger. On serait tenté d'en mettre d'autres en parallèle avec des films. La petite fille du tableau de Magdalena Guirao Julien fait penser au film de Jean-François Laguionie, le Tableau, sorti sur le grand écran en novembre 2011.

Dans un autre registre, Qu'est-ce que tu vois ? de Stéphane Sénégas fait appel à la sensibilité, citant Flaubert : "Pour qu'une chose soit intéressante, il suffit de la regarder longuement".

Chaque livre proposé par Kaléidoscope mérite d'être longuement regardé. Comme les Six hommes de David Mc Kee, publié pour la première fois en France à l'automne dernier. Cet artiste y souligne l'absurdité de la guerre d'un trait fin mais net.

Éditions Kaléidoscope, 11, rue de Sèvres, 75006 Paris
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