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jeudi 17 mai 2012

Seconde soirée à Cannes avec De rouille et d'os

Hier, j'étais en communion avec les festivaliers cannois, en visionnant Moonrise Kingdom. Voilà que je récidive en découvrant le dernier Audiard, simultanément présenté à Cannes ... et à Châtenay-Malabry, encore au Rex, que j'affectionne toujours autant.

J'avoue que j'ai été aidée par le fait de savoir à quel trucage le réalisateur avait eu recours pour montrer le handicap du personnage de Stéphanie dont une orque cisaille les jambes, accidentellement. Après Intouchables, et la Ligne droite, voilà le troisième long-métrage sur le même thème.

A chaque fois le monde du handicap nous est donné à voir sous un même angle. Les héros sont des personnes à qui jusque là et d'une certaine manière la vie sourit.

En résumé : Sans domicile, sans argent et sans amis, Ali trouve refuge avec son fils Sam, 5 ans, chez sa sœur à Antibes. Il connaît à peine son fils et ne sait pas comment l'élever.
A la suite d’une bagarre dans une boîte de nuit, son destin croise celui de Stéphanie. Il la ramène chez elle et lui laisse son téléphone. Il est pauvre. Elle est belle et pleine d’assurance. Il comprend vite qu'elle est dresseuse d’orques au Marineland. Il faudra que le spectacle tourne au drame pour qu’elle songe à lui faire signe et qu'ils soient de nouveau réunis. Elle est tassée dans un fauteuil roulant : elle a perdu ses jambes et pas mal d’illusions. Il va l’aider sans aucune pitié.

Je dois reconnaitre que je suis allée voir ce film pour les acteurs, pas seulement la formidable Marion Cotillard, ni le non moins sensationnel Matthias Schoenaerts mais aussi l'excellent Bouli Lanners, acteur et réalisateur (son film les Géants avait été sélectionné pour le festival Paysages de cinéastes) sans avoir très envie qu'on me fasse une énième leçon de morale sur le sujet. Même si ...

Je suis ressortie enthousiaste parce que la manière de filmer de Jacques Audiard est particulière, avec un très beau générique éblouissant de bleus et de rouges, des ralentis, des images sans sons directs, uniquement avec une musique, des cadrages inhabituels sur les nuques, des gros plans sur des visages et des coiffures "brutes de décoffrage", une forme de cinéma "vérité" sans fioritures qui, du coup ne provoque pas les larmes. D'autant que le véritable sujet du film n'est pas le handicap mais ce qui fait qu'on a besoin du regard de l'autre pour exister. Séduire, provoquer, faire monter l'adrénaline, être admiré, respecté, quitte à y laisser sa peau dans un combat à mains nues.

Là encore, mais cette fois avec une différence sociale moins prononcée entre les personnages que dans le scénario de Intouchables, le film parle de l'équilibre entre les émotions, du bien et du mal, du rapport entre l'argent et la violence, de ce qui est supportable ou pas.

Pas de leçon de morale à propos de la pauvreté. Il suffit d'une main cherchant des restes dans les poubelles des wagons et d'un semblant de festin sur une tablette. D'une petite réplique sur le rangement des yaourts dans un frigo : les périmés en haut. Beaucoup de non-dits très expressifs dans les haussements de sourcils et les moues de Marion Cotillard. Quand elle fait "une scène" à son pseudo pote elle le fait d'une voix lente et hachée : Si tu veux qu'on continue faut qu'on fasse les choses bien, faut qu'on ait des manières, ... j'te parle de délicatesse moi ...

Les dialogues sont ponctués de petites phrases susceptibles d'entrer dans le langage codé qui ponctue les SMS. Dans quelques semaines le "téou" pourrait bien être supplanté par un "t'es opé?"

De Rouille et d'os est programmé au Rex jusqu'au mardi 29 mai. Ensuite ce sont deux autres films sélectionnés à Cannes que vous pourrez voir : Cosmopolis, de David Cronenberg, et Sur la route de Walter Salles.

Et puis retenez dès à présent les dates du prochain festival Paysages de Cinéastes qui se déroulera du 7 au 16 septembre, toujours au Rex, 364 avenue de la Division Leclerc à Chatenay. C'est la Chine qui sera le pays à l'honneur pour cette 11ème édition.

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