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vendredi 7 décembre 2012

La galerie Laurent Strouk réunit ou oppose Damien Hirst et Philippe Pasqua

(billet mis à jour le 16 décembre 2012)

La richesse est un sujet qui divise les français depuis quelques semaines. Quand le monde de l'industrie s'écroule celui de l'art affiche une (apparente) bonne santé, souriant de toutes ses dents face à des mesures fiscales qui maintiennent les privilèges des collectionneurs.

Je ne cherche pas à dire que la vie d'artiste est facile mais simplement à pointer que l'artiste "maudit" autrefois peut désormais afficher sa cote sans complexe. Est-ce un signe des temps ? Les oeuvres ne font plus rêver puisqu'on nous rappelle que la mort est la seule vérité, aucun moyen d'y échapper. Tout n'est que vanité.

On pense à Coluche, le fondateur des restos du coeur qui faisait remarquer qu'à tout prendre un malade avait plus d'intérêt à être riche que pauvre. On songe à tous ceux qui s'enfuient de notre pays pour sauver quelques billets. J'essayais de les repérer l'autre soir, pendant le vernissage qui honorait deux artistes majeurs dans une galerie élyséenne. Car il faut être "riche à millions" pour acquérir les toiles ou les sculptures qui étaient présentées.
J'ai entendu une très jolie femme minauder qu'elle ne voudrait pas de çà chez elle, ... même si on la payait ajoutait-elle, me donnant l'idée que pourquoi pas, effectivement louer mon appartement pour exposer X ou Y.
Il y a tout de même des compositions border line. Je vois mal cette évocation de pot à eau sur un meuble de toilette XIX°. Elle étonne autant, posée sur le sol du monte-charge de la galerie.
J'ai remarqué un personnage extravagant se laissant photographier en suppliant de ne pas mettre le cliché sur Facebook d'un ton gourmand qui signifiant exactement l'inverse, me donnant l'idée que Twitter serait l'alternative mettant tout le monde d'accord.
J'ai vu une (autre) très jolie (moins jeune) femme posant devant une toile de Damien Hirst et qui, la jugeant trop colorée, sollicitait un vigile pour se placer à coté d'elle, histoire de contraster aussi sa propre peau blanche et sa blondeur, me donnant l'idée d'une nouvelle mode détrônant le cliché devant un monument architectural.

Chacun son truc pour dire "j'y étais". Je n'y échappe pas. Mea culpa. Et je me suis mise à regarder les murs attentivement. On oppose le peintre de la couleur, Damien Hirst, à celui du noir et blanc, Philippe Pasqua. Ce n'est pas tout à fait juste parce qu'on trouve aussi chez le premier des oeuvres où le noir contraste seul avec le blanc et on peut noter l'emploi du rouge dans presque toutes les grandes toiles monumentales du second.

On estime que l'anglais est optimiste, l'autre pas. Qu'il y en a un qui copie sur l'autre comme s'il était impossible de partager la même attirance pour les crânes. Ne comptons ni les points, ni les papillons !

C'est vrai que Damien Hirst proclame la mort joyeuse, explosive, étincelante de diamants, avec un humour très british pour nous rappeler que le tableau prendra de la valeur ... et au cas (improbable) où vous, lecteur, flairerait le filon sachez tout de même que la cote de DH a subi des soubresauts très affirmés ces derniers mois.
C'est vrai que Philippe Pasqua nous la montre macabre, même s'il la saisit à pleine main comme une boule de bowling. Il la fait sourire de toutes ses dents.
La dame semble porter d'immenses lunettes noires. L'homme est en position de coureur automobile.
Partout des papillons évoquent la fragilité et la brièveté de la vie. Quelques visiteurs se souvenaient des milliers de lépidoptères sacrifiés dans la fugacité de l'exposition In and out of love à la gloire de Damien Hirst à la Tate Modern en octobre dernier. Ici aucun n'est arrivé vivant sur les crânes d'aucun des deux artistes.
L'argent est aussi au coeur de l'exposition. Cette Vanité aux papillons, est un bronze plaqué argent réalisé en 2011 en 8 exemplaires par Philippe Pasqua. La feuille d'or resplendit sur le tableau ci-dessous, à gauche, Till death do us part, 2012. Les diamants étincellent sous la vitre protégeant son voisin, baptisé la même année For the love of God. Si Damien Hirst en a exécuté 5000 exemplaires ... ne serait-ce pas for the love of gold
Tout cela sera-t-il éternel ? On sent le passé émerger chez Philippe même si les immenses tableaux qu'il a peints sur le sujet l'ont été tout récemment dans la perspective de cette exposition. Damien serait davantage tourné vers l'avenir. Nous sommes entre les deux, juste dans le présent.
Damien Hirst est obsédé par le temps qui passe. Il l'écrit sur le coté de ce tableau. Il emploie des cadrans de montre (de luxe ...) en lieu et place des orbites sur ces sculptures qu'il a désigné en 2009 sous l'intitulé "the Hours spin skull".
A quelques pas de la galerie la plus belle avenue du monde éclabousse de lumières. Les décorations m'ont semblé décliner la même vanité ...
Damien Hirst vs Philippe Pasqua _ Skull à la Galerie Laurent Strouk, 2 avenue Matignon 75008 Paris - Ouvert de 10h30 à 19h du lundi au samedi. Fermeture exceptionnelle les 25 décembre et 1er janvier.
Pour en savoir davantage sur Philipe Pasqua, lire ou relire le billet que j'ai consacré à Work in progress au Storage.

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