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vendredi 6 octobre 2017

La perruche d'Audrey Schebat, mise en scène par l'auteur

Je n'aurais peut-être pas songé spontanément à aller voir La perruche. J'aurais eu tort. C'est une excellente comédie, et qui plus est, écrite et mise en scène par une femme qui a su reprendre les codes du boulevard sans perdre ses convictions féministes.

Audrey Schebat signe là une première mise en scène remarquable. Et on espère que bientôt elle nous en proposera une autre.

Le bouche à oreille marche déjà très bien puisque la salle était comble et que l'ambiance fut très vite animée. C'est que les deux personnages sont suffisamment caricaturaux, chacun à leur manière en pilotage automatique, pour provoquer des réactions dans la salle.

Un couple attend des amis pour le dîner, mais ceux-ci n'arrivent pas…  S’agit-il d’un accident, d’une séparation, d’un cambriolage ? A chercher les raisons de ce retard qui risque de devenir une absence, l’homme et la femme se disputent au sujet du couple de leurs amis. Naturellement, la femme prend la défense de son amie Catherine et l’homme de son collègue David. A confronter leurs visions radicalement opposées, ils enchaînent les quiproquos absurdes et les révélations intimes, remettant en cause, sans s’en rendre compte, les fondements de leur propre couple.

Arié Elmaleh (le mari) fait la tronche devant la télé. Barbara Schulz (la femme) cache en elle une forme de rébellion. Ces deux là m'évoquent le couple Virginie Effira-Benoît Poelvoorde, dans Une famille à louer de Jean-Pierre Améris.

Le mari demande à sa femme de lui éteindre la télé (qu'elle ne regarde pas elle-même...). Ce n'est pas grand chose, et c'est pourtant choquant. Parce que c'est très symbolique de l'ascendant qu'il prend constamment sur elle, qui rappelle d'emblée aussi la petite alouette qui bat de l'aile dans Maison de poupée d'Ibsen. La ressemblance s'arrête là même si c'est un nom d'oiseau qui a été choisi pour l'intitulé de la pièce.
On se demande qui est la perruche, une sotte peut-être un peu simplette... qui a plié les serviettes en forme de colombe pour faire plaisir à son amie (oiseleuse sur les quais).

Il suffit d'entendre cette bourgeoise lancer le cri du coeur oh non mon rôti à l'annonce que leurs amis ne pourront pas venir dîner au motif qu’ils ont été cambriolés pour penser qu'elle ne vaut guère mieux que son odieux mari.

A moins qu'on soit induit en erreur par la confusion de leurs sentiments. Certes, il est macho, et lâche avec ça, et condescendant, cela crève les yeux. Bientôt sa femme ouvrira les siens et réalisera combien elle se fourvoie en sa compagnie. Idiote ou machiavélique, que préférera le chéri ?

Chacun accepte le principe de se dire toute la vérité alors qu’aucun n’est près à l’entendre. Les dégâts seront à la mesure du silence qui a précédé.

Audrey Schebat a finement étudié le microcosme bourgeois. Elle a observé beaucoup de couples malheureux en s’interrogeant sur le moment où la crise se déclencherait, en guettant le grain de sable qui allait gripper une vie où l'on a trop longtemps laissé les choses s'enkyster qu'inévitablement tout prendrait des proportions hors normes en cas de doute.

L'effet de miroir est double. Sur scène parce que le duo invitant n'est guère plus solide que le duo invité. Dans la salle parce que beaucoup de spectatrices se disent qu'elles ont le même ... à coté d'elles. Du coup les perruches sont (aussi) dans la salle ...
Qui dit boulevard dit retournement de situation et il y en aura plusieurs. Les clichés ont la vie dure mais ils devront rendre les armes.
L'auteure (au centre sur la photo) a écrit des dialogues aux petits oignons et on approuve Barbara quand elle dit qu'elle n'avait pas lu un manuscrit aussi drôle depuis Poiret. De tels rôles ne se refusent pas, même si on est en couple dans la vraie vie.
La perruche d'Audrey Schebat, mise en scène par l'auteur
Avec Barbara Schulz et Arié Elmaleh
Au Théâtre de Paris – Salle Réjane
Du mardi au samedi à 19h matinée le dimanche à 17h

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